
Nouveau défi écriture de Madame Kea Ring. Mon premier jour de participation parce que j’ai tout de suite eu de l’inspiration pour écrire.
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C’était une journée de merde, il fallait bien le dire. Mon patron avait, pour la énième fois, essayé de me faire des avances. J’avais poliment refusé mais il avait insisté. Ce n’était pas nouveau et je savais que c’était la seule raison pour laquelle il m’avait engagée. J’avais naïvement crue que c’était pour mes compétences, mais j’avais vite compris que non. Bref.
Je n’ai jamais de courrier mais je regarde quand même. Une lettre y réside, avec uniquement mon prénom dessus : Erin. Une fois dans mon appartement, je déchire l’enveloppe. Je m’attendais à ce que ce soit mon voisin du dessous qui se plaignait encore du fait que je marche dans mon appartement et que je fais du bruit – désolée de vivre – mais pas du tout. La lettre disait « Erin, J-3 avant ta mort ». Je regard le mot, éberluée. Comme si j’allais croire à quelque chose de ce genre. Je n’ai pas que ça comme problème. J’ai des vrais problèmes à gérer. Genre, trouver un nouveau travail avec un patron qui n’est pas un obsédé sexuel. Essayer de vivre aussi, avec le peu que je gagne. Je jette le mot.
Le lendemain, une nouvelle lettre. « Erin, J-2 avant ta mort ». Pff. Allez, poubelle.
Le surlendemain, nouvelle lettre. « Erin, J-1 avant ta mort ». Poubelle.
J’avoue que le quatrième jour, j’arrive à ma boîte au lettre et je vois l’enveloppe. J’arrive dans mon appartement, je regarde autour de moi, la lettre dans la main avec écrit « Erin, jour de ta mort ». Je pouffe puis j’éclate de rire en tournant dans mon appartement. J’ai bien fait de ne pas y croire. Je jette la lettre et je commence à me faire à manger. Alors que je referme mon frigo, j’entends du bruit derrière moi. Je me tourne et je hurle. Un homme sur mon canapé.
_ Bonjour Erin !
_ Qui… qui êtes-vous ?
_ La mort.
Je le regarde et je hausse un sourcil. La mort ?
_ Sortez de chez moi, voulez-vous ?
_ C’est le jour de ta mort, Erin. Tu as reçu les letres.
Il se lève et pointe la poubelle où se trouvent encore les quatre lettres.
_ C’est une blague ?
_ Non, du tout. Tu n’aurais sans doute pas dû la prendre autant à la légère.
_ Parce que j’ai des vrais problèmes, moi. Je n’ai pas le temps de mourir. Je dois d’abord…
_ Tatata… il aurait sans doute fallu y penser en recevant la première lettre, Erin.
_ Vous rigolez.
_ Non, je suis tout ce qu’il y a de plus sérieux.
Je le regarde. Et je comprends. Cet attirail noir, ce ton monotone. C’est la mort. La mort comme on la représente en général. L’ange de la mort ? Je ne sais pas quoi lui dire.
_ Tu penses à quoi, Erin ?
Je ne pense à rien. Je n’ai rien de particulier. Tout le monde dit que, lorsqu’on va mourir, on voit toute sa vie passer devant ses yeux. Mais je ne vois rien. Rien du tout. L’homme me regarde.
_ Bah, allez-y, tuez-moi, je n’ai rien à perdre.
_ En effet. Je vois ça.
Je ferme les yeux. Rien ne se passe. Au bout de quelques minutes, j’ouvre les yeux. Il n’y a rien, sinon une nouvelle lettre sur la table de ma cuisine. Je l’ouvre et je lis : « Maintenant, tu sais ce que tu dois faire, Erin. Donne un sens à ta vie ». Je regarde le mot. Effectivement, c’est ce que je me disais. Je n’ai rien à prouver mais j’aimerai bien, le jour de ma mort, penser à tout ce que j’ai fait. C’est le moment de prendre ma vie en main.
_ Alors ?
_ Elle a compris.
_ Tu vas te faire tuer, Mortimer.
_ Me faire tuer ? Mais je suis déjà mort.
Les deux hommes éclatent de rire et trinquent dans le pub dans lequel ils se retrouvent tous les soirs. Hector boit un gorgée de bière. Mortimer est une âme sensible. Il aime bien aider les autres. Et Erin était une nouvelle personne qu’il fallait aider.
_ A la tien, Mortimer.
_ A Erin, répond-il.