
La plus folle aventure de sa vie. Reina n’y pensait pas souvent car elle n’avait jamais aimé la nostalgie mais ce jour-là, alors qu’elle passait devant un kiosque-café, elle repensa instantanément à cette folle aventure. Elle s’assit sur un banc, le sandwich à la main et se laissa aller à ses souvenirs.
Flash back. Année 2014. Reina a 20 ans. Elle s’ennuie ferme chez ses parents et décide de passer son temps sur les routes. Au fur et à mesure de l’été, une idée germe en elle, une idée folle, surtout pour ses parents, de simples agriculteurs, qui ne pourraient pas comprendre pourquoi elle a envie d’entreprendre ça. Mais elle décide de leur en parler et, surprise, ils ne s’y étaient pas opposés. Il n’avaient pas le temps de débattre avec leur fille ou alors n’avaient pas l’envie. Parfois, Reina se demandait pourquoi ils avaient eu un enfant. Ils semblaient plus des partenaire de travail que des amoureux. Elle avait, un jour, posé la question à sa mère. Cette dernière avait répondu simplement : « apparemment, c’est attendu ». Comprendre : la société nous dit de faire des enfants, on ne va pas chercher plus loin et on fait des enfants. Non pas que Reina ait eu une enfance triste ou autre. Elle avait été gâtée mais pas trop, ses parents avaient veillé à ce qu’elle grandissent avec leur principes, notamment écologique et sur la nature. Ses parents étaient des gens de la terre, des gens de la campagne et du labeur quand Reina avait grandi pour devenir une jeune femme qui adorait lire et parler politique. Tout juste si ses parents ouvraient un livre autre que pour faire un ragout – et encore – quant à la politique, ce n’était même pas la peine de tâter le terrain. Mais cela, avant qu’elle ne parte dans sa grande aventure, elle ne le savait pas, elle ne s’en était pas tout à fait complètement rendue compte.
Le jour du départ, elle était en train de mettre des conserves dans son coffre quand sa mère sortit avec une enveloppe à la main. Elle la tendit à Reina, qui n’avait pas besoin de l’ouvrir pour savoir ce qu’elle contenait.
_ Non, ça va aller, t’inquiète pas. Au pire, je trouverait un petit boulot sur le chemin.
_ Ne sois pas bête, ma fille. Si je te le donne, c’est que je peux.
Reina regarda le contenu de l’enveloppe. Presque mille euros, en coupures de dix ou de vingt. Elle fronça les sourcils. Certes, ses parents étaient une référence en terme de produits bio et ils venaient, après tout, d’ouvrir une épicerie avec uniquement leur produit dedans. Mais elle n’avait jamais pensé à sa famille comme une famille riche. Les agriculteurs en général ne roulaient pas sur l’or, c’était bien connu. Elle plia l’enveloppe et la mit dans son sac, celui qui contenait tout ce dont elle avait besoin et hocha la tête en direction de sa mère. Puis ce fut son père qui arriva et lui tendit une boite. Elle haussa les sourcils et l’ouvrit avec précautions. Un téléphone dernier cri lui apparut aux rétines et elle lança un regard interrogateur à son paternel. Lui n’était pas du genre à faire des cadeaux, ni de porter une affection différente à sa fille que ce qu’il lui avait toujours apporté. Comme dit, ils n’avaient pas de common ground si ce n’était pour les tâches de la ferme que Reina avait appris à faire depuis qu’ell était petite. Faire les confiutres avec sa maman et les bocaux avec son papa, oui. Mais avoir des cadeaux alors qu’elle partait juste. pour pas longtemps, enfin, à priori.
_ Papa, je ne peux pas…
_ Je sais que ta mère a du te donner de l’argent. Donc, moi aussi, je voulais faire un cadeau. Apparemment, c’est vraiment très in.
Reina adorait quand ses parents essayaient. Et là, ils essayaient tellement qu’elle en eut les larmes aux yeux. Elle les prit tous les deux dans ses bras et les serra fort. Voilà qu’elle allait finir par croire qu’elle ne reviendrait pas.
_ Merci les gars. Prenez soin des chats pour moi.
_ A bientôt, ma puce.
_ A bientôt, championne.
C’est ainsi qu’elle partit, une petite larme à l’œil, dans la fraicheur de la matinée, après avoir aidé une dernière fois – même si elle n’avait aucune idée du fait que ce soit la dernière – aux tâches de la matinée à la ferme.
Le moteur vrombit et elle s’éloigna dans la nuit. Assez rapidement, dernière elle, il n’y avait que la route, la route et encore la route. C’était ça, sa grande aventure. Partir en voiture, sans savoir où allait. Du moins, c’est ce qu’elle avait dit à ses parents. Elle savait parfaitement où elle voulait aller. Et elle en prit la direction. Elle avait hérité de quelques traits des gens de la campagne, aussi, elle prit les petites routes pour arriver à destinations. Elle avait regardé sur internet et avait au moins deux jours de routes si elle ne s’arrêtait pas, quatre ou cinq si elle faisait des étapes. Elle avait opté pour les étapes, en bonne petite fille consciencieuse.
Aussi avait-elle noté les villages étapes sur sa route, afin de s’arrêter en conséquence. Elle avait prit un appareil phot avec elle qu’elle avait acheté avec son argent, durement économisé. Ses parents lui donnait de l’argent de poche et, si elle les aidait, à la ferme, à l’épicerie ou sur le marché du dimanche matin, elle avait un peu plus d’argent. Depuis deux ans, elle s’était fait un petit pactole et elle avait organisé tout son voyage en fonction de cela. L’argent de sa mère était un plus, pour prendre des souvenirs, pour acheté de l’essence, pour aller dans un hôtel au lieu de dormir dans la voiture. Mais elle comptait tout de même économiser et ne pas faire trop de dépense extravagantes. Encore un trait hérité des gens de la campagne.
Trois jours après son départ, à la tombée de la nuit, elle entrait enfin dans la ville qui allait changer sa vie. Elle sourit en se demandant qui s’était un jour dit que Calais allait changer sa vie. Des migrants ? Des gens voulant rejoindre à tout prix l’Angleterre. Et elle qui y allait pour le plaisir. Elle se posta sur le quais, sachant très bien que la billetterie n’était pas ouverte, qu’elle allait peut-être devoir attendre plusieurs jour avant de pouvoir embarquer. Elle s’en fichait. Elle trouva une place dans un parking pas loin de l’embarcadère et se posta sur un banc, face à la Manche. Une si grande étendue d’eau comme elle ne voyait pas dans sa campagne natale.
Elle sortit son téléphone. Elle avait un SMS de sa mère, simple. « Ca va ? » Elle répondit tout aussi simplement puis rangea l’appareil dans la voiture. Elle profita des dernières lueurs du soleil pour faire de très belles photos de la Manche puis elle se posta à nouveau sur le banc et attendit. Quand ses pieds commencèrent à geler et que les frisson sur ses bras s’étaient transformés en vraie chair de poule, elle rejoignit la voiture et s’allongea à l’arrière.
_ Demain, avec le ferry de 10h, ça vous va ?
Reina hocha la tête et paya le prix du bateau. Elle prit le billet et demanda :
_ Vous savez si je peux changer de l’argent pas loin ?
_ En ville, vous avez un change, pas loin de la gare.
_ Merci.
Elle se rendit à pied au centre ville. Beaucoup d’agitation, mais elle se retint de dire quoi que ce soit. elle avait un but, un seul, le change. elle changea six cents euros, ce qui lui fit, environ cinq cents livres et retourna à la voiture. De nouveau sur le banc, elle attendit.
L’arrivée de l’autre côté de la Manche se fit sans encombre. Il lui fallut quelques kilomètres pour se sentir à l’aise avec la conduite du mauvais côté mais elle finit par y voir un challenge supplémentaire à son petit périple. Elle n’y croyait presque pas. Elle était en Angleterre. En Angleterre ! Elle qui avait adoré ce pays étant ado, le voyant dans bon nombre de série TV qu’elle regardait à l’époque, elle y était enfin. La Terre des Spice Girls, S Club 7 et David Beckham !
Elle s’arrêta dans une petite ville dont elle ne vit pas le nom et se gara devant ce qui ressemblait le plus à une boulangerie. En entrant, quelle ne fut pas sa surprise de découvrir une épicerie avec une partie vente de sandwich. Drôle de fonctionnement mais soit. Le seul sandwich qui restait, c’était un sandwich au bacon. BLT, qu’il disait là-bas : Bacon, Laitue, Tomate. Rien de fou, s’était alors dit Reina. Mais c’était sous-estimer le pouvoir du sandwich au bacon. Il était onctueux, moelleux, salé mais pas trop, tomaté mais pas trop, pas trop de laitue… tout ce qui fait qu’un sandwich est juste… parfait. Le lendemain, avant de repartir, elle en acheta un autre et le garda précieusement pour la route.
Et aujourd’hui, alors qu’elle était en route pour aller retrouver ses parents, le souvenir du sandwich au bacon de sa jeunesse était saisissant. Après ce road trip en Angleterre, elle n’avait plus jamais été la même. Elle était revenue en faisant savoir qu’elle ne comptait pas reprendre la ferme familiale, qu’elle voulait faire des études et qu’elle voulait devenir professeur. Ses parents, comme toujours, avait applaudit son choix et n’avaient pas montré la moindre peur quant à la reprise de la ferme.
« Le train numéro 5746 en provenance du Havre et à destination de Marseille Saint Charles partira voie 3. Il desservira… »
Comme un automate, Reina prit la direction de la voie, suivant la foule de personnes – seule, accompagnées, familles – qui se pressait vers la voie annoncé par la madame de la SNCF. Depuis le road trip, il y a huit ans, elle n’avait pas revu ses parents. Quand elle était rentrée, elle avait directement pris une appartement à Paris, pour y faire ses études. Ses parents n’avaient rien dit, comme à leur habitude.
Mais, il y a deux semaines, alors que ses parents l’appelaient une fois par mois environ, le numéro de sa mère apparut sur son écran. Elle l’avait appelé la semaine d’avant et Reina sut que c’était anormal.
_ C’est ton père.
Juste trois mots, qui changent une vie. Reina n’avait rien demandé, rien dit, rien laissé paraitre. Elle avait simplement répondu qu’elle ne pourrait pas être là mais qu’elle pouvait descendre dans deux semaines. Sa mère avait dit qu’elle comprenait et bientôt, Reina se trouvait à réserver des billets de train à 23h pour rejoindre sa mère.
La ferme n’avait pas changé. Sa mère conduisait peu mais maintenant, elle allait devoir s’y mettre. Plus question de le mettre derrière son mari. Elle mangèrent en silence et se couchèrent tout aussi en silence. Les chats étaient eux aussi morts depuis longtemps, remplacés par d’autres qui s’acclimatèrent assez vite à la nouvelle venue. Reina passa la nuit dans sa chambre d’enfance, entourée de nouvelles bêtes qu’elle caressait comme si elle les connaissait depuis toujours.
Six heures du matin. Debout. Elle vit sa mère qui s’activait déjà aux champs. Hors de question pour elle de revenir sur la promesse qu’elle s’était faite alors qu’elle prenait le chemin du retour de l’Angleterre : plus jamais de tâches de la ferme. Alors, elle entreprit de faire le café et un gâteau pour que sa mère aie de quoi boire et manger quand elle reviendrait. Une fois le tout préparé, elle s’assit devant le feu, le relança avec des gestes experts puis s’assit dans le fauteuil et commença à lire. Le soleil se levait tout juste.
Total des mots pour la journée : 1931
Total des mots pour le NaNo : 15 683
En plus : plus que mille mots de retard. J’avoue que mon esprit de compétition – le peu que j’en ai en tout cas – n’est pas content de ne pas rattraper mais bon. Je fais un peu plus chaque jour, je vais finir par rattraper. De toute façon, je sais que je pourrais pas ne pas gagner. Je suis comme ça, que voulez-vous.