Un compliment compliqué et de la grammaire un peu hachurée

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Il y a peu de temps, j’ai reçu ce compliment assez déroutant, je trouve : « t’es une bonne suceuse ». Ok, c’est gentil. Enfin, c’est rassurant. La pratique est la bonne mais je me demande ce qu’il y a derrière. Je sais pas, je ne pense pas que beaucoup de femmes disent des trucs du genre : « Tu fais bien les cunis ». Non pas que je sois experte.

Alors pourquoi le « compliment » « t’es une bonne suceuse » est accepté ? Pire, il m’est arrivé de demander si j’étais une bonne suceuse. Après, ça vient sans doute de mon manque certain de confiance en moi et donc un besoin de validation de la part du mâle partageant mon lit. Mais je m’égare.

Récemment donc, j’ai réfléchi aux deux partis prenants dans une fellation et comment on pouvait interpréter cette fameuse phrase.

Du côté de la femme

Ok, c’est un compliment, il ne fait pas de doute que c’est un compliment. La pratique est la bonne. Je ne pense pas qu’un homme qui trouve une fellation moyenne viendrait dire ce genre de choses, cela ne semble que logique. Donc c’est rassurant. Parce que, messieurs, la fellation ne vient pas naturellement. Encore faut-il en avoir envie. J’avoue que les premières fois où on me l’a demandé, je ne savais légitimement pas quoi faire. J’ai regardé tous les pornos possibles et imaginables sur le sujet mais je n’ai pas réussi, au début, à comprendre s’il y avait une processus particulier à adopter. Les plus romantique d’entre vous vont dire : « mais faut écouter son partenaire » et tout le blabla des gens heureux et/ou en couple. Pas facile de demander à un mec que tu ne connais pas tant que ça même si tu couches avec « au fait, niveau pipe, tu veux que je fasses quoi ? » Un petit guide de la pipe facile existe-t-il ? Je ne pense pas. Chaque homme et donc chaque membre étant différent, il n’y a pas de règles. Tout comme il n’y a pas de règles pour les cunis. Donc, pardonnez-moi l’expression, mais il faut apprendre sur le tas. Je ne sais pas si toutes les femmes ont cette réaction mais je suis assez réticente à faire des pipes à tout va. Ok, ça comble quand on a nos règles, c’est une façon de faire plaisir autrement. Mais bon, la pipe à chaque rapport… Et puis cher messieurs, la pipe, c’est chiant. Des fois, je regarde des pornos pendant lesquels une meuf suce un mec pendant dix minutes et là je me dis déjà qu’au bout de deux minutes ça me soule… Dix minutes à passer sa bouche sur une teub, franchement, c’est pas l’éclate. Le vrai problème de la fellation (simple) c’est qu’on – femme – en retient aucun plaisir. Mais le compliment est gentil.

Du côté de l’homme.

Pour la majeure partie de la gente masculine, fellation rime avec bon. Slogan à: la pipe, c’est bien. Un pourcentage non négligeable de ces hommes considèrent que rapport sexuel signifie automatiquement qu’il va avoir le droit à une polissage de sa flûte. Erreur. Enfin erreur. Si on est gentille et de bonne humeur, on vous la donnera bien, votre petite pipe. Il faut aussi dire que c’est confortable. Madame s’occupe de vous et de votre attribut bien en chair.

Mais il faut que vous sachiez une chose : n’appuyez JAMAIS sur la tête d’une femme. C’est humiliant et rabaissant et tout un tas d’autres mots en -ant.

Pire, certains hommes trouvent que c’est LE MUST. Nan mais c’est bon, c’est une bouche sur un pénis, c’est pas foufou et nous ça nous mets pas non plus dans une joie folle, on en rêve pas la nuit. Après, je trouve quand même que les pornos ne montrent pas des fellations réaliste. Encore une fois, qui reste dix minutes à sucer une teub ? Si jamais vous vous posez la question, non, vous n’êtes pas en position de pouvoir, parce qu’en un coup de mâchoire… Accompagné de ce compliment s’ajoutent souvent des phrases type de mec qui aiment la fellation : tu fais ça bien ou hum c’est bon ou oui, c’est bien. Le must de l’encouragement pour continuer.

Profitez de la fellation comme on profite d’un chocolat chaud en hiver au coin du feu après une ballade dans la neige, ou comme on profite d’une bière bien fraîche par une chaude soirée d’été. Ne la prenez pas pour acquise ou vous moitié va se lasser.

Analyse grammaticale de ce « compliment »

Postulat de départ : T’es une bonne suceuse.

Postulat que j’ai décidé de diviser en quatre parties.

1) T’es

On note tout de suite cette contraction de tu et de es pour former t’es. Parole de cité ou simple flemme de la part des émetteurs ? Une question que l’on peut légitimement se poser. Ce premier point est-il le résultat d’une envie de rester jeune et rester « dans le coup » (pun not intended) ou, dans le feu de l’action, l’homme n’a-t-il plus le temps de penser aux règles s’appliquant à la grammaire française ? Le compliment deviendrait-il plus acceptable si la grammaire était correcte ? La phrase « tu es une bonne suceuse » est-elle plus tolérable ? À cela, je répond sans flancher : non. Car cette contraction est bien loin d’être le seule problème avec cette phrase.

2) Une

Passons à l’article choisi : une. Comme une fille parmi tant d’autres. Comme une fille que l’on ne connaît pas. Comme une fille, au hasard, dans la rue. Comme une fille dont on se souviendra pas du nom, parce que de toute façon, elle ne compte pas. Rappelons à toutes fins utiles, que l’article une est un article indéfini, comme si on niait l’existence même de cette femme qui pourtant, sur le moment, nous fait plaisir. Ce n’est pas une femme parmi tant d’autre, non. Pourtant, c’est ce qui est inclus dans cet article. Une, comme le hasard, ou encore la flemme de faire une définition plus précise, de faire une définition plus humaine. Définir la femme par l’article « une », c’est comme si l’homme niait qu’à un moment, ne serait-ce qu’un infime moment, que cette femme a eu une importance, même minime. L’utilisation de l’article « une » pose la femme comme un objet parmi tant d’autre qui a été capable – et heureusement – de le sucer pendant un court instant de son existence.

3) Bonne

Attaquons nous maintenant à l’adjectif « bonne ». Je pense qu’à la base, l’adjectif est plutôt positif, cela n’est pas discutable. En 1970, l’adjectif devait être bien vu, et utilisé à bon escient. Prenons un exemple : Elle est vraiment bonne, ta soupe. Mais aujourd’hui, en 2018, l’adjectif « bonne » à une signification tout autre. Sauf erreur de ma part et ce depuis quelques années, cela a une signification d’attrait sexuel pour la personne. Phrase d’exemple : vas-y, elle, elle est trop bonne. Ce que j’ai remarqué depuis peu, c’était la dimension implicite de cette adjectif, utilisé souvent en parlant des femmes : elle est bonne à baiser. Tout cela rejoint bon gré mal gré le thème et le pseudo compliment de cet article. T’es une bonne suceuse : de toute façon tu es bonne à baiser, donc tu es bonne pour sucer. La logique n’est pas mauvaise en soi et, théoriquement, on pourrait accepter que cet adjectif soit utilisé. Sauf que… de temps en temps, « t’es une bonne suceuse » se change en « t’es bonne » et ça c’est pas très acceptable, surtout quand on a des principes comme moi.

4) Suceuse

Maintenant, pour ce qui est de suceuse. Qualifier les gens de telle ou telle adjectif leur fait avoir des étiquettes et cela à vie. Quand ces adjectifs se transforment en nom comme ici, c’est comme si l’on disait : cette fille = une suceuse. Pour ma part, cela me gêne parce que je ne considère pas que la fellation soit un droit inaliénable comme le pense certains hommes que j’ai pu côtoyer plus ou moins longtemps. Non, la fellation n’est pas un pré-requis à un rapport sexuel et les filles n’ont pas besoin d’être des suceuses pour vous plaire.

Ce faux compliment, je l’ai entendu souvent. Pourquoi ? Parce que j’annonce la couleur aux hommes que je fréquente et je leur dis cash que je ne suis pas très portée sur la chose. Comme pour me rassurer. Quand me connais juste un peu, on – et surtout les hommes – sait facilement que je n’ai pas une estime de moi débordante et je pense que cela part d’un bon sentiment que de me dire que je fais bien. Personnellement, ça me mets la pression que l’homme avec qui je suis en veuille plus et encore plus et que je ne sache pas quoi faire. Je ne suis pas non plus en train de dire que la fellation devrait être « réservée » à quelqu’un que vous aimez, mais je pense que c’est un acte assez spécial pour ne pas le faire à tout va.

7 commentaires

  1. On me l’a déjà souvent dit aussi (sans prétention mdr) et j’avoue que pareil, je le prend comme un compliment et ça me donne de l’assurance mais inversement j’ai un sentiment un peu partagé quand même… Comme tu dis est ce qu’on leur dis nous « tiens t’es un bon lecheur » (Ahahah)

    Moi avant je détestais faire les felations, vraiment je pouvais pas… C’était avec le papa de mes enfants. Depuis, je n’ai connu que des hommes circoncis et bizarrement c’est devenu une des choses que je préfère 😀
    Je prend vraiment du plaisir mais c’est plus un plaisir de l’égo. J’aime faire plaisir et j’aime voir que j’ai le pouvoir :p
    Monsieur n’aime pas spécialement ça du coup en ce moment je suis limite frustrée à ce propos 😀

    Mais je suis d’accord, interdiction de pousser la tête… si on me fait ça, j’arrête limite sur le champ. Pour moi ça revient au même que les insultes.

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